La route des crêtes et le garde du corps

Nous quittons Marseille et nous attaquons à nos premiers dénivelés. Tatiana pousse le vélo une partie de la montée, et Julian atteint le col de la Gineste (330m) en pédalant ! Première longue descente, on apprend à manier le frein.

Nous enchaînons avec la route des crêtes, qu’on nous a recommandée pour ses vues imprenables. Nous nous élançons… Et descendons bien vite du vélo : la route est terriblement pentue. On pousse, on s’arrête, on parlemente. On pousse dur, dans cette pente à 24% (!). On rencontre Patrick-le-breton-en-camion, un bavard qui voyage depuis des mois le long des côtes européennes. Il s’arrête car son camion chauffe et il se demande s’il va tenir le coup. Nous reprenons, mi-pédalant mi-poussant, et atteignons enfin la crête : que c’est beau ! 

Nous admirons la vue sur la Méditerranée et ses falaises, à côté de nombreux badauds et d’un couple de mariés avec leur photographe. La lumière du soleil qui commence à baisser est effectivement particulière…

Redescendus à la Ciotat, un habitant nous indique un parc où planter la tente. La nuit, nous entendons les sangliers renifler autour. La lecture nocturne nous apprendra qu’il faut uriner dans les parages pour les éloigner, technique que nous pratiquerons par la suite. Nous sommes réveillés au matin par un groupe de joggueurs, et nous rendons au marché domenical.

Nous traversons des zones riches, avec des habitations très cossues, où même les voitures ont un abri avec vue sur la mer. Heureusement que la France ne (p)veut pas accueillir toute la misère du monde, sinon les berlines n’auraient plus ce plaisir.

La soirée nous fera drastiquement changer de décor. Alors que nous avons du mal à trouver un lieu où planter la tente dans la banlieue verte de Toulon, nous demandons conseil à un monsieur qui promène son chien. Il nous conduit à un terrain dont il est propriétaire, divisé en petites parcelles sur lequelles sont installées des maisonnettes de fortune qu’il loue. En voyant le lieu et l’ambiance, nous ne sommes pas très à l’aise, mais ne nous sentons pas en danger non plus alors on reste.

Nous rencontrons ainsi Guy, qui vit dans une de ces bicoques avec sa femme malade. Guy a à peine 60 ans mais plus que 2 dents. Il nous raconte sa vie et on hésite entre 3 options : soit on n’a pas bien compris à cause de son accent marqué et des difficultés d’élocution, soit il nous a raconté des bobards, ou alors il a vraiment une vie incroyable. 

Adolescent, alors que ça ne fonctionne pas à l’école classique, son père militaire l’aide à entrer à l’école nationale des garde du corps. En parallèle, il est actif dans la mafia toulonnaise, en lien avec la Sicile. 2 ans plus tard, comme il a bien réussit sa formation, il se retrouve garde du corps des grands politiques français : Giscard d’Estaing, Mitterand, Sarkozy à ses débuts… Alors qu’il travaillait pour Mitterrand en 1987 (?), il a un grave accident de voiture. Il est dans le coma pendant 2 ans, se réveille avec une très faible indemnisation et abandonné par une partie de ses proches. La suite l’a conduit à rencontrer sa 2nde femme, à avoir ses 2 « bébés » (comprendre ses 2 chiens) et à s’installer ici récemment. Comment connaît-il le propriétaire du terrain ? « On a fréquenté le même milieu (la mafia) à une époque ». Du coup on ne sait plus quoi penser du propriétaire, qui nous avait dit avoir travaillé toute sa vie dans les assurances. 

Quoiqu’il en soit, cette soirée nous a vraiment fait rencontrer un milieu qu’on ne côtoie pas au quotidien. Guy et ses proches ont une vie dont la précarité et la culture semblent tout droit sortis d’un épisode de l’émission  » streep-tease ».

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